RDC : Quand le dollar devient indésirable sur les marchés de Kinshasa

La situation économique à Kinshasa prend une tournure inattendue. Le dollar américain, longtemps perçu comme la valeur refuge, est désormais boudé par plusieurs commerçants. Une instabilité qui traduit le désarroi d’un marché local en perte de repères.
Dans les grandes artères commerciales de Kinshasa, la tension est palpable. Si certains citoyens dénoncent la dépréciation du dollar face au franc congolais, d’autres peinent à comprendre le retournement brutal du marché. Désormais, de nombreux petits commerçants refusent catégoriquement les paiements en billets verts.
« Allez d’abord changer vos dollars ! », lancent-ils à leurs clients, contraints de courir vers les cambistes avant d’espérer acheter ne serait-ce qu’un pain ou un bidon d’huile.
Mais même ce passage obligé ne garantit pas la tranquillité. Car sur les points de change, la confusion règne également. Les cambistes, souvent maîtres de la rue, fixent leurs propres taux d’échange, bien éloignés de ceux publiés par la Banque centrale du Congo. Ce mardi matin, certaines zones de la capitale ont vu le taux descendre jusqu’à 1 800 francs congolais pour un dollar, un chiffre qui illustre l’ampleur du désordre.
Cette situation fragilise tout un pan de l’économie urbaine. Les détaillants, pris entre la peur de perdre et la méfiance vis-à-vis d’une monnaie devenue instable, préfèrent s’en tenir au franc congolais. Dans les marchés populaires de Gambela, Victoire ou Matete, le dollar est même devenu synonyme d’embarras.
« C’est comme si on portait un fardeau. Personne n’en veut », confie une vendeuse de légumes.
Pendant ce temps, les autorités monétaires semblent minimiser l’ampleur du choc. Les communiqués officiels parlent de “fluctuations temporaires”, mais sur le terrain, les ménages constatent une réalité bien plus rude, les prix changent au gré de la peur et de la rumeur.
Au-delà de la capitale, les répercussions commencent à se faire sentir dans d’autres grandes villes comme Kananga ou Mbuji-Mayi. Dans un contexte où la confiance monétaire est déjà fragile, cette nouvelle onde de choc met à nu la dépendance de l’économie congolaise à la devise américaine.
Le franc congolais, pourtant symbole national, reste une monnaie que beaucoup hésitent encore à considérer comme stable.Alors que Kinshasa découvre, à contre-courant, les effets d’un dollar en perte de vitesse, une leçon s’impose, la confiance dans la monnaie nationale ne se décrète pas, elle se construit. Et tant que les Congolais continueront à naviguer entre deux monnaies, l’équilibre économique du pays restera un mirage instable.
Par : Doly MUNTU

