Tshopo : une révolution silencieuse pour les filles grâce à l’alliance MSI RDC – Enabel

À Kisangani, une dynamique inédite s’installe dans les établissements agricoles. Longtemps ignorées, les questions d’hygiène menstruelle et de santé reproductive sont désormais au cœur de l’action éducative. Enabel et MSI RDC, partenaires du projet GIFT, ont réuni ce 25 juillet à l’Hôtel Congo Palace les acteurs clés du changement. Objectif : pérenniser des acquis qui redessinent l’avenir des jeunes filles.
Derrière l’acronyme GIFT (Gender Inclusive Framework for Training), se cache un projet ambitieux, garantir un environnement scolaire sain, sûr et inclusif pour les adolescentes dans les écoles agricoles de la Tshopo. Financé par l’Agence Française de Développement (AFD) et piloté par Enabel, ce programme a été mis en œuvre avec l’appui technique de MSI RDC, à travers une stratégie innovante de mobilisation communautaire baptisée Bosolo Nde.
Déployé dans cinq institutions, les ITA de Maendeleo, Simi-Simi, Yangambi, Yanonge et l’IFA Yangambi le projet a visé l’amélioration de l’accueil des jeunes filles dans le système éducatif rural, tout en luttant contre l’absentéisme lié aux règles, les tabous, les discriminations et la précarité hygiénique.

Au cœur du dispositif, les MS Grandes Sœurs, un réseau de jeunes éducatrices issues des communautés locales, formées pour accompagner, sensibiliser et orienter leurs pairs.
« Nous sommes parties du constat que les filles parlent plus librement avec d’autres filles. Les MS Grandes Sœurs ont mené des activités dans les écoles et dans les communautés. Résultat, plus de 1 500 femmes ont pu être référées vers nos services », a déclaré Ange Dando Palama, responsable de la communication comportementale chez MSI RDC.
La stratégie Bosolo Nde, pilotée par MSI RDC, a misé sur la proximité et la confiance pour briser les tabous et encourager un dialogue direct sur la santé menstruelle et reproductive.
« Le changement ne vient pas toujours des grands discours. Parfois, il commence dans une salle de classe, entre deux adolescentes qui s’écoutent, se soutiennent et s’ouvrent au savoir. C’est ce que Bosolo Nde a permis », a ajouté Mme Ange Dando Palama.
Grâce à leur travail de proximité, les écoles ciblées ont observé une nette amélioration du taux de présence des filles, notamment durant leur période menstruelle, autrefois synonyme d’absences fréquentes et de stigmatisation.


Des engagements forts, portés par plusieurs voix
Dr Patrick Djomo, Directeur pays, MSI RDC présent à Kisangani pour l’événement, le représentant de MSI a souligné la portée structurelle du projet :
« Nous n’avons pas seulement voulu informer, mais transformer. L’hygiène menstruelle, trop souvent ignorée, est devenue un enjeu de dignité, d’égalité et de réussite scolaire », a déclaré Dr Patrick Djomo.


Il a salué l’engagement des écoles partenaires, où enseignants et directions scolaires ont progressivement adopté une posture bienveillante et inclusive à l’égard des adolescentes.
Prosper Ntema, Portfolio Manager, Enabel du côté du bailleur, le ton est à la consolidation. Le représentant d’Enabel a mis en lumière la méthode :
« Grâce à une approche multisectorielle et inclusive, nous avons réussi à intégrer l’hygiène menstruelle et la santé reproductive dans la formation agricole, en impliquant familles, enseignants et élèves », a affirmé Prosper Ntema.
Il a insisté sur le fait que la clôture du projet marque non pas une fin, mais une transition vers de nouvelles étapes d’intégration dans les politiques publiques.




Dans les établissements bénéficiaires, l’impact est tangible. Les enseignants ont signé un acte d’engagement en cinq points, parmi lesquels, la création d’un environnement respectueux, la prévention des violences et l’intégration de l’éducation à la santé menstruelle dans les pratiques quotidiennes.
« Par cet acte, nous affirmons notre volonté de bâtir une école où chaque fille peut apprendre, s’épanouir et rêver sans peur », ont-ils déclaré collectivement.
Un plaidoyer fort des autorités éducatives
Le Directeur provincial de l’éducation (PROVED), Alain Muimbi Muimbi, a marqué la cérémonie par un discours mobilisateur :
« Ce projet a transformé des écoles en espaces sûrs. Des filles qui se cachaient pendant leurs règles participent aujourd’hui activement. Ce n’est pas une fin, c’est un nouveau départ », a-t-il déclaré, avant d’ajouter :
« Je vous exhorte à promouvoir l’hygiène menstruelle dans nos milieux scolaires. Cette question ne concerne pas que les filles. Les garçons aussi doivent comprendre et accompagner. »
En guise de clôture, il a exprimé sa reconnaissance à Enabel, MSI RDC ainsi qu’aux autorités politiques, saluant notamment l’engagement du Président Félix Tshisekedi et du gouverneur Paulin Lendogolia, tous deux cités comme soutiens du combat pour l’éducation inclusive.
Alors que les rideaux se referment sur ce chapitre du projet GIFT, les acteurs impliqués autorités, enseignants, jeunes, ONG semblent unis par une même conviction, la transformation est en marche, et elle ne doit pas s’arrêter.
En intégrant durablement l’hygiène menstruelle dans l’environnement scolaire, ce partenariat a démontré qu’il est possible d’agir sur les normes sociales, briser les tabous, et ouvrir les portes de l’avenir à toute une génération de filles.

Journaliste|PDG du média YOKA INFOS